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« Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. » Arthur C. Clarke
Les appareils à interface tactile sont monnaie courante à présent, entre smartphones et tablettes. Il est très simple de les manipuler du bout des doigts.
Mais ce qui reste problématique, c'est la saisie de texte, gérée par un clavier virtuel, associé à une correction automatique parfois hasardeuse. Outre la petite taille des touches, l'emplacement des boutons d'interface pas forcément heureux n'aide pas à écrire de façon fluide (utilisateurs d'iPhone, n'envoyez-vous pas systématiquement vos messages en cherchant à taper u, i, o ou p ?).
Puis j'ai découvert SwiftKey. C'est un clavier alternatif pour Android. En effet, le système de Google propose la possibilité d'utiliser un logiciel tierce partie pour la saisie (contrairement à l'autre société californienne).
Et j'ai été soufflé. Je n'avais pas idée de la façon dont les algorithmes de prédiction d'écriture avaient évolué. Le clavier Android ressemble beaucoup à celui d'iOS, à la différence près que le premier propose plusieurs mots pour l'autocomplétion.
SwiftKey fonctionne de la même manière. On commence à taper un mot, et il en suggère trois, la proposition la plus probable placée au milieu. Mais ensuite intervient la magie.
Après avoir tapé le mot, le logiciel propose le mot suivant ! Le meilleur est que souvent c'est précisément ce qu'on voulait dire. En configurant le clavier pour placer le mot suggéré avec un appui sur espace, on peut écrire toute une phrase sans avoir rien tapé !
La magie
Cette magie vient de la connaissance par le logiciel des expressions communes de diverses langues, et de l'apprentissage au fur et à mesure des habitudes de l'utilisateur. On peut même le connecter à ses comptes mails ou de réseaux sociaux pour l'entraîner. Il connaît alors le style d'écriture de la personne, et les propositions deviennent plus pertinentes encore.
Fin du fin, le programme apprend aussi notre façon de taper sur le clavier. On vise tous le centre d'une touche, mais le contact effectif peut être légèrement décalé. SwiftKey prend en compte ces imprécisions de contact, en comparant les emplacements touchés avec le mot choisi. Et il utilise ces statistiques pour déterminer avec plus de précision les frappes de l'utilisateur.
On voit sur ce panneau de statistiques (fourni par SwiftKey) que j'ai tendance à taper sur le bas des lettres, par exemple.
Carte thermique de saisie
Enfin, la dernière mise à jour du programme apporte le support de la saisie "flow", qui consiste à former des mots en passant le doigt sur les lettres de façon continue sans le relever (démo en vidéo ici). Ce mode de saisie existe également sur la dernière version du clavier Android standard, mais sans la prédiction diabolique de SwiftKey...
SwiftKey est disponible sur Google Play. Il n'est même pas cher !
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Deux documentaires extraordinaires.
Je le dis d'entrée, tout net : je n'aime pas les documentaires contemplatifs à la Home. Mais Baraka et Samsara m'ont laissé sans voix.
C'est quoi ?
Baraka |
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Samsara |
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Baraka et Samsara sont deux documentaires de Ron Fricke. Filmés sur film 70 mm, ils montrent des images du monde (près de 50 pays couverts pendant des années), sans aucun texte ou commentaire.
Et c'est bien ?
OUI ! Je le disais au début, je n'aime pas Home. Moi j'aime comprendre et qu'on me raconte une histoire. Mais là où Home échoue dans ce but en se contentant d'aligner des images esthétiques avec des textes écolos moralisateurs en incrustation, Baraka et Samsara réussit à me faire passer des messages, des émotions et ce sans un seul mot.
Ron Fricke fait suivre des images qui se rapprochent, ou qui s'opposent, en accélère certaines, et y associe une musique jamais vraiment innocente : calme ou rythmée, la musique influence la perception des images.
Oui, bon, en quoi ça change des autres documentaires genre Home ?
Le montage génial d'une part, l'utilisation de l'accéléré pour accentuer les effets de lumière naturelle, et surtout les portraits.
Home prend le parti d'une vision de la Terre vue du ciel. Baraka et Samsara en prennent le contre-pied, en allant au plus proche des gens, une sorte de mise en abîme se terminant sur un portrait sur le visage d'une personne du sujet, un plan fixe du visage d'une personne, fixant la caméra d'un air grave.
Baraka est un documentaire de 1992, les images qu'il contient ont été reprises ou revues ailleurs. Mais je ne connais pas de film montrant la civilisation humaine de cette façon. On part d'un plan large, d'un paysage (un peu à la Home justement), et on se rapproche de plus en plus, s'intéressant aux détails, et on finit par être confronté à un habitant de cette civilisation.
C'est là vraiment le coup de génie de Fricke. Suivant le thème et/ou le traitement du sujet (gai, ou triste, suivant la vitesse et la musique), ce regard final nous implique. Je s'interroge devant les danseuses japonaises, je me sens coupable devant les portraits de victimes de l'Holocauste, je me sens honteux devant les regards tristes des hôtesses de bars en Asie.
Ok, ok, ça a l'air bien. Quelque chose à ajouter ?
Oui, Baraka et Samsara ont été filmés en 70 mm (c'est gigantesque comme pellicule !). Les images sont magnifiques et très détaillées. Je ne saurais donc que recommander le visionnage de ces films dans l'idéal au cinéma (Samsara est dans les salles actuellement), ou au pire sur un grand écran, avec une source de bonne qualité (Blu-Ray), et surtout un ensemble d'enceintes dignes de ce nom (home-cinema indispensable).
Bandes-annonces
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JSA
JSA, pour Joint Security Area (공동경비구역), est un film coréen de Park Chan-Wook, sorti en 2000, adapté du roman de Park Sang-Yeon.
Synopsis
Inspiré de faits réels, JSA suit l'enquête d'une commission internationale sur un incident dans la zone démilitarisée coréenne où un soldat sud-coréen dit avoir été capturé par l'armée du nord, dont il a tué deux soldats pour pouvoir s'enfuir. L'enquête révèle que la vérité est plus complexe, et pose la question sur l'état d'esprit du peuple coréen vis-à-vis des deux Corées, 50 ans après le cessez-le-feu.
Frères de sang
Frères de sang (태극기 휘날리며), est un film coréen de Kang Je-gyu, sorti en 2004.
Synopsis
Frères de sang suit deux frères, incorporés de force dans l'armée sud-coréenne lors de la guerre de Corée. Jin-Tae, l'aîné, ne reculera devant rien pour tenter de sauver son jeune frère Jin-Seok en le faisant démobiliser. Mais le destin, emportant les deux frères et le pays tout entier, ne le voit pas ainsi...
JSA et Frères de sang sont des films de deux réalisateurs de la nouvelle vague coréenne. La modernité de leur réalisation, qui tranche avec les mises en scène plus "théâtrales" d'antan (en Corée) permet de rendre ces deux films plus "regardables" du point de vue d'un œil occidental.
Les deux films se passent dans le monde militaire : l'un pendant la guerre de Corée, l'autre au tournant de notre siècle. Ils portent l'un et l'autre un regard sur la relation entre les deux Corées, entre les citoyens de deux pays issus d'un seul et même peuple.
- Frères de sang montre la séparation initiale du peuple coréen, où des membres d'une même famille, enrôlés arbitrairement d'un côté et de l'autre (certains ont sciemment décidé de rejoindre le nord ou le sud) ont été obligés de se battre l'un contre l'autre.
Le film retrace les grand événements de la guerre de Corée, les offensives, les contre-offensives, l'implication de l'ONU, la riposte chinoise, etc... (voir Guerre de Corée sur Wikipedia pour les détails). L'histoire peut sembler un peu confuse en ne sachant rien du conflit (Où sont-ils ? Que font-ils là-bas ?). On peut cependant y sentir le climat social de l'époque, entre suspicions, traîtrises, parfois même barbarie. - JSA nous montre l'état d'esprit de la population nord et sud-coréenne presque 50 ans plus tard, après des dizaines d'années de martelage idéologique contre les habitants de l'autre côté (en Corée du Sud, une des pires insultes reste "communiste"). Les souvenirs de la douloureuse séparation du pays s'effacent peu à peu, et les jeunes générations n'ont pas à priori cette animosité envers leurs contemporains du nord ou du sud. Reste l'endoctrinement qui ressort comme une seconde nature à un moment inattendu.
Cinquante ans après la guerre qui les a déchirées, les tensions sont encores vives entre les deux Corées. Ces deux films nous expliquent peut-être que cela ne tient pas seulement aux idéologies, mais aussi aux rapports humains ambigus de deux peuples frères et ennemis à la fois...
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Reflexions sur Princesse Mononoke et Nausicaä de la vallée des vents de Hayao Miyazaki.
Nul besoin de présenter Hayao Miyazaki, dessinateur japonais et réalisateur, fondateur du studio Ghibli. Son travail parle souvent du rapport entre l'homme et la nature, de l'influence de la technologie et de l'industrialisation sur l'homme et son environnement. Deux œuvres illustrent particulièrement bien ces thèmes : Princesse Mononoke et Nausicaä de la vallée des vents.
Princesse Mononoke (もののけ姫), film d'animation sorti en 1997, raconte le voyage d'Ashitaka, prince d'une vieille tribu japonaise exclue du système féodal. Ashitaka sauve des jeunes filles de son village d'un monstre qui se révèle être un sanglier géant, un esprit de la forêt, corrompu par un mal étrange. Le sanglier jette une malédiction sur Ashitaka, qui est contraint de d'exiler afin de trouver les origines de ce mal, et trouver une possible rédemption. Ce voyage l'amènera à rencontrer San, une jeune fille élevée par Moro, la déesse louve, et ils seront pris au milieu d'un conflit entre les dieux anciens, les esprits de la forêt, et les hommes, forts de leur nouvelle technologie, les armes à feu, issues de la forge du fer, et la poudre à canon.
Princesse Mononoke raconte donc d'un point de vue neutre, celui d'Ashitaka, ni du côté des dieux animaux, ni sujet impérial, l'histoire des hommes qui s'émancipent de leurs dieux, de manière violente et brutale, et décrit le début de l'industrialisation, et de son impact sur l'environnement, comme la déforestation. Le dieu sanglier Okkoto souligne ce changement dans l'équilibre des forces : "Chaque jour nous devenons plus petits et plus stupides", en contraste avec le pouvoir des hommes qui grandit.
Et cela nous amène à Nausicaä de la vallée du vent (風の谷のナウシカ). C'est une bande dessinée diffusée dans le magazine Animage monthly de 1982 à 1994, adaptée au cinéma en 1984.
Nausicaä est la princesse du royaume de la vallée du vent, une des rares enclaves non polluée de la planète. Dans un futur indéterminé, les hommes ont poussé l'industrialisation au paroxysme, épuisant les ressources naturelles et endommageant gravement l'écosystème. Ce monde s'écroule lors des "Sept Jours de Feu", où des colosses fabriqués par les hommes, les "Dieux-guerriers", ravagent ce qui reste de la civilisation humaine. Dès lors, les survivants s'organisent à essayer de subsister dans un monde hostile et dévasté, où ils sont la proie d'insectes géants et où leur espace vital se réduit de jour en jour à cause de spores toxiques sécrétées par les champignons mutants.
La vie de Nausicaä bascule quand elle vient en aide à des réfugiés d'un autre royaume porteurs d'un ancien artefact datant des Jours de Feu. Dès lors, elle devient l'enjeu d'une course au pouvoir des grandes puissances militaires du monde, alors qu'elle découvre la véritable nature des spores, connaissance qui pourrait bouleverser le destin de la planète... Nausicaä se lance à corps perdu dans une aventure à l'issue incertaine, dans l'espoir d'empêcher une nouvelle apocalypse.
Nausicaä de la vallée des vents est un peu un projet "hobby" de Hayao Miyazaki. Il a connu une parution étalée sur douze années, car l'auteur continuait l'histoire quand il avait le temps. Mais quelle histoire ! Dès les premières pages, on est happé dans le récit, d'une richesse, d'une complexité et d'une profondeur incomparable. Nausicaä est une véritable saga de plus de mille pages d'un univers post-apocalyptique ultra-détaillé, cohérent et réaliste. Hayao Miyazaki décrit ici sa vision du monde après notre civilisation industrielle, après que l'humanité ait brûlé, consommé et souillé toute la planète. L'Homme est devenu un dieu dans Mononoke, et l'Homme s'est déchu de sa divinité par orgueil et avidité dans Nausicaä. |
Nausicaä |
Les deux histoires sont très sombres, violentes, même, mais elles sont toutes deux équilibrées par l'espoir des rares hommes - et femmes - de bonne volonté, et du trait doux et subtil - pourrait-on dire organique ? - de Hayao Miyazaki.
Le génie de Hayao Miyazaki ne s'arrête pas à la touche artistique, ses histoires et ses personnages sont tout autant remarquables. Les protagonistes de ces histoires ne sont jamais tout blancs ou tout noirs, ils ont chacun leurs motivations et leurs caractères. Ils ne sont pas méchants pour être méchants, ni bons pour la bonté de la chose. Leurs actions ont des causes et des raisons. Cela apporte une épaisseur au récit, et écarte tout manichéïsme.
Le dessin de Nausicaä pourrait rebuter certains lecteurs, étant juste encré, non colorié, mais le niveau de détail proprement hallucinant balaie toute critique. Chaque case est une œuvre d'art (voir illustration). Hayao Miyazaki ne ménage pas ses efforts, et dessine des dioramas gigantesques d'armées en mouvement où le moindre soldat de quelques millimètres de haut est représenté jusqu'au moindre pli de vêtement. Nausicaä a donc été adapté en animation, alors que la bande dessinée n'était pas encore terminée. L'histoire y est donc très incomplète, si vous devez voir les deux, regardez le film en premier, comme une bande-annonce. |
Dessins de Nausicaä |
Chronologiquement, Nausicaä a été écrit avant Mononoke. Comme si Hayao Miyazaki avait voulu nous montrer d'abord le futur sombre de la civilisation industrielle, avant de nous rappeler que les hommes et la nature avaient vécu en équilibre dans un lointain passé. On peut y voir un message lancé au spectateur, presque un avertissement, Mononoke fantôme des Noëls passés, Nausicaä fantôme des Noëls futurs.
Pour finir, une petite note technique sur Mononoke : le DVD vendu en France comporte trois pistes audio, japonaise, anglaise et française. La bande-son japonaise utilise le doublage traditionnel japonais, où les doubleurs parlent de façon théâtrale, presque comme du nô, et elle sonne un peu faux si on n'est pas habitué à ce timbre.
San & Moro |
La bande-son anglaise a été doublée aux Etats-Unis, par des acteurs connus comme Gillian Anderson, Billy Crudup ou Claire Danes. Et le doublage est fait de façon remarquable, on sent les acteurs réellement impliqués dans l'histoire, comme dans la réplique de Moro dite par Gillian Anderson : "My poor, ugly, beautiful daughter." Gillian Anderson accentue le "beautiful" comme pour contrebalancer "poor, ugly". On entend vraiment là les sentiments partagés de la mère déesse louve décrivant sa fille humaine adoptive : cette pauvre créature hideuse est sa fille. Elle est donc belle. A côté de ça, le doublage français est... plat. |
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